Les entreprises françaises peinent à exploiter les données, notamment celles issues d’Internet et des outils numériques. Pour les services formation, le défi est double : montrer l’exemple en tirant parti des données de leurs outils et plateformes de formation et se préparer à l’intégration de l’IA dans les dispositifs pédagogiques.
D'une façon générale, les organisations françaises sous-exploitent les données
Seulement 34 % des entreprises françaises de 10 salariés ou plus exploitent réellement leurs données (source : Insee). Moins que leurs homologues allemands ou espagnols (40 %), loin derrière certains pays d’Europe centrale où près d’une entreprise sur deux utilise l’analyse des données. Un paradoxe est particulièrement préoccupant : les données issues d’Internet, pourtant les plus accessibles, restent largement sous-exploitées ! Causes ? Le défaut de compétences, la résistance au changement et le manque global d’acculturation à la donnée. Ce retard est d’autant plus critique que la donnée est désormais au cœur des performances opérationnelles et des stratégies de développement.
Illustration sectorielle : la mine de données oubliée dans les plateformes LMS
Les services formation sont assis sur un amas de données qu’ils ont souvent peu exploitées. Avec la norme Scorm, largement utilisée depuis une vingtaine d'années, il était déjà possible de collecter des informations essentielles : temps passé sur un module, taux de complétion, score obtenu. Même élémentaires, ces données permettaient de générer des analyses pertinentes pour identifier les contenus les plus performants, repérer les points de décrochage et ajuster les dispositifs pédagogiques. Néanmoins, peu de services formation ont pris la peine de croiser ces indicateurs pour prendre des décisions concrètes. Aujourd’hui, l’écosystème numérique de formation offre des outils d’analyse bien plus avancés, capables de collecter des données riches sur les comportements des apprenants : progression individuelle, temps passé par module, interactions avec les contenus ou encore taux de satisfaction (pour citer seulement ces domaines). Mais ces fonctionnalités continuent d'être sous-utilisées ; elles servent essentiellement à produire un reporting basique, loin des possibilités d’analyse plus fine qu'elles peuvent proposer.
La responsabilité des services formation
Les services formation doivent montrer l’exemple à l'ensemble des métiers et des collaborateurs de l'entreprises, à l'instar, par exemple, des services chargés de la relation client. Les apprenants (qui, après tout, sont des clients de la formation !) méritent la même attention que celle portée aux consommateurs externes de l'entreprise : analyse des comportements, des attentes et des retours des apprenants x consommateurs pour ajuster leurs offres et personnaliser l’expérience. L'analyse des données produites dans les interactions avec l’écosystème numérique de formation (LMS, LXP, mobile learning, plateformes d’évaluation, réseau social learning, etc.) peut suggérer la voie d'une expérience plus fluide, engageante et adaptée aux besoins réels des apprenants. Suivre les taux de complétion, repérer les contenus sous-performants, personnaliser les parcours ou anticiper les besoins en compétences : des leviers parmi d'autres pour démontrer la valeur ajoutée de la formation.
Le chantier Data du service formation : de la donnée à la décision
En 2025, les responsables formation sont incités à lancer le « chantier Data » pour transformer les informations disponibles en décisions concrètes et stratégiques. Objectif : passer d’une collecte passive à l'exploitation active des données pour optimiser les dispositifs et améliorer l’expérience des apprenants, ce qui passera par l'audit des données existantes et de leurs sources, le recensement des informations disponibles, la création de tableaux de bord dotés d’indicateurs clés pour suivre l’efficacité des dispositifs de formation, et par l'acculturation des équipes formation à la « data literacy » pour leur permettre d'interpréter ces indicateurs et de les traduire les résultats en action concrète. Livrable attendu : le « plan d’action data driven », affichant des analyses claires, des recommandations précises et des ajustements réguliers des dispositifs. L'enjeu pour le service formation : abandonner le suivi statique au profit d'une dynamique proactive, tournée vers l'anticipation des besoins, l’amélioration continue et l’optimisation des dispositifs pédagogiques. En filigrane : l'opportunité stratégique qui s'offre aux services formation de démontrer leur disposition à innover, à développer l’impact de leurs dispositifs, et de prouver leur valeur auprès des directions générales. Le temps est venu de passer de la donnée à la décision !
One more thing : l'intégration de l’IA
L’intelligence artificielle a commencé de révolutionner la formation professionnelle grâce à des dispositifs d’apprentissage adaptatifs, des recommandations automatiques et des analyses prédictives. Sa promesse est évidemment conditionnée à la disponibilité de données structurées (l'informel n'est pas exclus), fiables et correctement exploitées. Le chantier Data permettra de poser les bases pour alimenter les algorithmes d’IA et tirer pleinement parti de leurs capacités. (On n’oubliera pas que la capacité de production de nouveaux contenus, par l’IA générative, dépend aussi des contenus pédagogiques déjà existant sous de multiples formats, que l’on peut également considérer comme des données.)
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